La transaction pénale plutôt que le tribunal

Certains auteurs d’infraction se voient proposer de payer une transaction afin d’éteindre l’action publique plutôt que d’être renvoyés devant le tribunal. Comment cela est-il possible ? Qui peut en bénéficier et à quelles conditions ?

 

 

Le parquet prend l’initiative

Dans un précédent article, nous avions indiqué que le parquet pouvait être comparé à une gare de triage dans la mesure où il lui appartient de décider des suites à donner aux dossiers judiciaires qui lui sont soumis : classement sans suite, renvoi devant le tribunal, etc.


Parmi les possibilités qui s’offrent à lui, la transaction pénale tient une place de plus en plus importante.

 

Qu’est-ce que la transaction pénale ?


La transaction n’est pas un dispositif neuf. Elle a notamment été beaucoup appliquée en matière de police de la circulation routière. Toutefois, en matière de délits, elle restait sous-utilisée sans doute parce que la manière dont elle était perçue et son cadre légal n’encourageaient pas son usage.


Mais depuis la nouvelle loi de 2011, elle a été largement appliquée et elle est surtout connue parce qu’elle a permis de conclure des dossiers emblématiques et porter sur des montants très importants.


En résumé, la transaction constitue une manière de régler un contentieux pénal à travers un processus de négociation entre le parquet et la partie poursuivie, aboutissant au paiement d’une somme au bénéfice de l’Etat. 


 

Avantages et critiques du dispositif


Principalement, la transaction a été adoptée parce qu’elle permet de désengorger les tribunaux surchargés et d’éviter que des dossiers souvent complexes soient frappés par la prescription. En effet, une décision sur les suites d’une affaire peut donc intervenir plus rapidement que devant une juridiction.


Pour la partie poursuivie, le principal avantage sera d’éviter le tribunal et la stigmatisation d’une condamnation transcrite au casier judiciaire.  


Néanmoins, on ne peut ignorer le débat soulevé par ceux qui considèrent que ce dispositif conduit à une justice de classe car il serait ouvert à ceux qui ont les ressources pour payer une transaction. En outre, il serait surtout proposé en matière de délinquance financière, ce que d’aucuns voient comme un traitement différencié des illégalismes.


Cette tension montre que le débat se cristallise entre les tenants d’un certain pragmatisme et les tenants d’une justice égalitaire.

 

Quelles sont les conditions pour proposer une transaction ?


Il convient de respecter les conditions suivantes :

  • La transaction émane du parquet et elle est facultative ;

  • Le fait concerné ne paraît pas de nature à devoir être puni d'un emprisonnement correctionnel principal de plus de deux ans ou d'une peine plus lourde, y compris la confiscation le cas échéant ;

  • Il ne peut s’agir d'une atteinte grave à l'intégrité physique ou de certaines infractions en matière de douanes et accises ;

  • Pour les infractions fiscales ou sociales, il faut que les impôts ou les cotisations sociales éludées aient été payées avant d’envisager la transaction et il faut l'accord de l'administration fiscale ou sociale ;

  • Une victime ne peut s’opposer à la procédure mais elle devra être indemnisée avant que la transaction soit proposée ou, pour le moins, l’auteur devra avoir préalablement reconnu par écrit sa responsabilité civile.

 

Comment le parquet procède-t-il ?


Le procureur du Roi fixe les modalités et le délai de paiement et il précise les faits pour lesquels il la propose. Le montant ne peut pas être supérieur au maximum de l'amende prévue par la loi et doit être proportionnel à la gravité de l'infraction. L'auteur de l'infraction doit aussi abandonner les biens ou avantages patrimoniaux saisis ou, s'ils ne sont pas saisis, il doit les remettre.


Sans entrer dans les détails de la procédure, le procureur du Roi peut aussi proposer une transaction quand un dossier est à l’instruction ou qu’une juridiction de jugement est saisie pour autant qu'aucune décision définitive n'ait pas été rendue.


Lorsque le montant de la transaction est payé selon ce qui a été convenu, particulièrement en matière de délai, l’auteur ne peut plus être poursuivi. Dans l’hypothèse contraire, il peut être poursuivi devant le tribunal. 


Il faut préciser que le paiement de la transaction éteint l'action publique à l'égard de celui qui paie. Or, il est tout à fait possible que le parquet n’ait pas proposé de transaction aux autres auteurs, coauteurs ou complices ou que ceux-ci ne se soient pas acquittés du paiement convenu. Dès lors, ils peuvent être poursuivis devant les juridictions compétentes et les victimes peuvent intenter des actions contre eux.



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Claude BOTTAMEDI

Chef de Corps d’une zone de police er



Source :

Article 216 bis du Code d’instruction criminelle sur :

https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg_2.pl?language=fr&nm=1808111901&la=F